La décharge de Mbeubeuss mise en place depuis 1968, est située sur l’emplacement d’un lac asséché de Malika (15 kilomètres de Dakar). Un site favorable aux activités agricoles, notamment en raison d’une nappe non loin de la surface du sol. En effet, elle n’excède pas plus de 15 mètres de profondeurs, cette profondeur varie, en lors des saisons humides : entre 33 cm et 4 m en raison de l’infiltration de la saison des pluies. Ceci explique la présence de jardins potagers qui se sont implantés dans la zone depuis plusieurs générations mais leurs activités sont aujourd’hui menacées par la vieille décharge.
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| Décharge de Mbeubeuss |
J’écoute actuellement un reportage sur Mbeubeuss! Un des gars chargé de recycler les déchets qui y sont déversés annonce que depuis le début l’année il a ramassé plus de 100 bébés qui sont mis dans des sachets en plastique!— Substitut Valdes🧡 (@DialloFabiine) 5 juin 2018
« Autrefois, il y a avait une centaine de manguiers ici, dit-il en montrant du doigt son jardin, mais aujourd’hui, tous les manguiers sont morts » peste le vieux Baye Serigne. Pour lui, le coupable est tout désigné : la décharge de Mbeubeuss qui surplombe son jardin potager. Pour Baye Serigne, c’est la fumée que dégagent les pneus brûlés qui ont tué les manguiers. « Il y a des chercheurs de l’université qui viennent souvent faire des prélèvements dans l’eau de puits que nous utilisons pour arroser nos plantes. Ils nous ont défendu de boire de cette eau », informe-t-il.
Selon une étude réalisée par une équipe de chercheurs de l’Institut fondamental d’Afrique Noir (IFAN), la teneur en nitrate et en chlorure est largement supérieure aux normes de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS). Cette étude a également montré une forte présence de métaux lourds dans les zones situées près de la décharge de Mbeubeuss. Cette étude a également révélé que la présence de métaux lourds affecte le rendement de certaines variétés de légumes tels que la laitue et le navet chinois, ce qui ralentit leur croissance et diminue leur vigueur.
A quelques mètres du potager de Baye Serigne se trouve celui de Mère Gadiaga (Nom d’emprunt NDLR). Cette sexagénaire de teint clair, tatouée au menton nous confie que ses rendements ont quasiment baissé de 60%. « On cultivait de l’arachide, de l’oseille, du haricot etc. mais aujourd’hui on ne cultive que de l’oignon et de l’aubergine ici car le sol n’est plus fertile. Si nous avions le choix, nous allions diversifier notre culture », nous informe celle pour qui, la décharge n’a apporté rien de positif. « Cette décharge m’a trouvée ici. Je cultive ce jardin depuis maintenant 60 ans. Quand j’étais petite, j’apportais le repas à mon père. Lui aussi a hérité de ce lopin de terre de son père. C’est la raison pour laquelle je n’accepte pas les propositions de vente qui m’ont été formulées », affirme mère Gadiaga. « Je léguerai ce jardin à ma descendance », affirme-t-elle tout en jetant un regard affectueux à son petit-fils.
Juste à côté du potager de Mère Gadiaga, se trouve celui de Baïdy Diop. Pour lui, si rien n’est fait, la décharge finira par engloutir leur jardin. « Elle ne cesse d’empiéter sur nos jardins », explique-t-il.
Juste à côté du potager de Mère Gadiaga, se trouve celui de Baïdy Diop. Pour lui, si rien n’est fait, la décharge finira par engloutir leur jardin. « Elle ne cesse d’empiéter sur nos jardins », explique-t-il.
Les maraîchers utilisent des moyens rudimentaires pour cultiver leur jardin. Baïdy Diop, se faufile entre les feuillages pour nous montrer les jardins qui sont en train d’être grignotés par la décharge et ce, les pieds nus. Pourtant, des études ont démontré que « la présence de larves d’anguillules qui sont directement infectantes à travers la peau, constitue un réel danger pour la santé des agriculteurs. »
L’annonce de la fermeture de la décharge a suscité de l’espoir chez les maraîchers néanmoins, l’effectivité de cette mesure tarde toujours à se réaliser depuis qu’elle a été évoquée. En attendant, ils essaient de perpétuer ce gagne-pain légué par les ancêtres.
