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| Dr Bakary Sambe |
Depuis les attentats de Ouagadougou et Grand-Bassam,
les autorités sénégalaises sont sur le qui-vive. C’est dans ce contexte de
psychose que le docteur Bakary Sambe a tenu une conférence ce mercredi 11 mai
dans les locaux du Cesti. Il a tenu a édifié les étudiants en journalisme sur
le phénomène djihadiste.
Le Dr Bakary Sambe
commence son exposé par un triste constat : de nos jours quand on parle de
terrorisme, de guerre sainte on pense automatiquement (à tort ou à raison) à
l’Islam. Or d’après lui la guerre sainte n’existe pas en islam. Ce terme serait
une traduction lapidaire du mot djihad (effort
en arabe). Le terme guerre sainte aurait été utilisé pour la première fois par
le pape Urbain II en 1091 lorsqu’il envoyait les chevaliers combattre sur le
chemin de Dieu. Selon le pape Urbain II ceux qui mourraient pouvait espérer
aller au paradis. « C’est le
même discours que tiendrait n’importe quel djihadiste », affirme Dr
Sambe.
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| Le dernier livre de Bakary Sambe, Boko Haram |
Donc selon le Dr
Sambe, par ailleurs enseignant-chercheur au centre d’étude des religions (CER)
de l’université Gaston Berger de Saint Louis, pense que les djihadistes ne font
qu’une manipulation des symboles religieux pour des visées politiques. Les
religions ne poseraient pas de problèmes ni les textes religieux mais leur
interprétation. La difficulté d’interprétation
du Coran « aussi
bien pour les chercheurs et journalistes et même les jurisconsultes réside dans
le fait que c’est un livre qui n’est ordonné ni de manière chronologique ni de
manière thématique. » Il ajoute que l’autre problème toujours selon le
chercheur est que la « le politique
a influencé le religieux même dans l’interprétation des textes. »
Il a aussi profité
de l’occasion pour présenter son dernier livre intitulé Boko Haram, du problème nigérian
à la menace régionale. Le problème Boko Haram était éducatif à ses
débuts donc politique. Les étudiants du Nord Nigéria qui ont fait leur
formation dans les madrassas ne voyaient pas leurs diplômes reconnus par l’Etat
central. Du coup ils ont rejeté à leur tour le système qui les a marginalisés.
C’est dans ce contexte que serait né Boko Haram qui était une secte à ses débuts.
Le groupe a fini par se radicaliser du fait des répressions des forces de
l’ordre nigérianes (le fondateur de Boko Haram est mort en détention).
Aujourd’hui le
groupe est en train d’étendre ses tentacules dans les zones du lac Tchad. Les
Etats africains particulièrement ont donc intérêt à éradiquer cette gangrène. « Les attentats de Ouagadougou ont
signé la fin de l’exception de l’Afrique de l’Ouest », déclare-t-il.
Cependant, il pense
que les solutions militaires ne feront qu’aggraver la situation et vont pousser à
une militarisation à outrance du continent. Les contingents américains et français ne feront qu’attirer plus de
terroristes.
Selon lui les Etats africains doivent réfléchir sur
des systèmes éducatifs performatifs. Il s’est notamment prononcé sur le cas du
Sénégal et a affirmé que l’Islam soufi peut être un rempart contre le
terrorisme s’il parvient à didactiser son message. Il doit l’adapter à cette
jeunesse tournée vers la modernité qui risque d’être capter par l’idéologie
djihadiste qui utilise la modernité technologique pour combattre la modernité
sociale. Les confréries doivent par ailleurs sortir de leurs accointances
répétitives avec les pouvoirs politiques avec tous les régimes qui les
discréditent.
Pour Bakary Sambe il faut commencer à réfléchir sur
les voies de sortie du terrorisme. Et la question qu’il se pose est la
suivante : va-t-on indéfiniment empêcher les africains de parler à leurs
enfants y compris ceux déjà considérés comme perdus ou bien faudrait- il tôt ou
tard investir les ressources culturelles endogènes en terme de médiation de
conflit pour sortir du djihadisme ?
Quelques termes
utiles
Fatwa : avis juridique sur une question qui n’a pas été
tranché par les textes fondateurs.
Conditions d’une fatwa : doit être un
fin connaisseur sociologique de la situation des gens, doit être à l’abri du
besoin pour ne pas être corrompu, pas de conflit d’intérêt entre ce qu’il doit
trancher et lui.
Islamiste : partisan de l’islam politique.
Salafiste : quelqu’un qui appelle au retour aux pratiques
islamiques des pieux anciens de la première génération du prophète Mouhammad
(psl).
Wahhabisme : version saoudienne du Salafisme.



